Frustration Relax

2008 est vraiment une drôle d'année pour moi, entre les reformations de groupes que j'apprécie et la découverte de certains qui me rassure sur l'avenir de la musique en général... Frustration fait partie de cette dernière catégorie...
Sur la foi d'une proposition de concert de quelqu'un de bien connu ici, je me suis procuré le dernier album de ce groupe français. Il est vrai que j'aurais pu commencer cette chronique par "en 1979, dans les brumes d'une sordide banlieue anglaise, quelques jeunes ont eu l'idée miraculeuse de déverser leur énergie dans une musique qui sort du commun", mais nous sommes en 2008, en France, et je découvre cette formation qui est loin de parodier ou de vaguement s'inspirer de ses aînés anglo-saxons. Nous avons une collision musicale empreinte de pré-Joy Division : Warsaw (pour la voix et le chanté particulier), Wire (pour l'énergie brute et la longueur des plages musicales) et The Fall (pour le son décalé du synthé en particulier et la construction originale de certains morceaux). Ces influences sont revendiquées par le groupe, mais j'y ajouterais un soupçon de Stranglers et de Sonic Youth...
Cet album n'a pas de vocation commerciale et peut rebuter de fines oreilles dés le premier morceau. L'ambiance générale n'est pas à la franche rigolade et les tympans sont mis à rude épreuve avec ce chant qui éructe, crie, gémit, cette guitare rêche et tranchante, une basse plombée, le synthé qui titille et une batterie martiale. Les démonstrations musicales ne se situent pas spécialement sur les mélodies, ou des exercices de styles mais plutôt axées sur l'énergie pure post punk, marquée par des déflagrations soniques.
Le premier morceau est une sorte de présentation électro bizarre du groupe, we have... Frustration !! Le "son" véritable de ce groupe s'installe dans "Relax" qui donne une furieuse envie de se lever avec ces riffs saignants et répétitifs... "Shake Me" enfonce le clou avec une basse vombrissante et des synthés syncopés... Le break au milieu n'est fait que pour reprendre son souffle et sentir la rage monter. "As They Say" est la chanson que je préfère, au point de l'avoir écoutée en boucle une journée entière pratiquement (rires). L'intro est bien amenée avant de basculer sur le corps de la mélodie qui est imparable... Le rythme fait chalouper n'importe quel corps normalement constitué, même si on n'arrête pas de penser au fantôme de Ian Curtis... La batterie martiale impose sur "Shades From The Past" une ambiance bien singulière, voire indus. "No Troubles" comprend une basse bavarde et un chant d'écorché. "Too Many Questions" est sans doute l'autre gros morceau de cet album, démarrant avec des plaintes synthétiques, un piano vieillot, une batterie électro, une basse cold... Le tout formant un son pouvant porter la voix vers des sommets insoupçonnés. "Brothers" est vraiment la chanson la plus écorchée avec ces cris éprouvants pour les non avertis. "Waiting For The Bad Things" est plus calme, voire presque classique dans toute cette exploration musicale brute et jouissive. "She's So Tired" est sous influence joydivisionesque...
L'album se termine avec "Faster" au son terriblement industriel. Une ouverture vers des chansons encore plus radicales ? J'avoue ne pas avoir encore écouté les deux premiers EP, mais j'ai pris une sérieuse claque à l'écoute de cet album... J'ai hâte de voir leur performance scénique pour pouvoir dire que j'ai découvert une pépite...